.... la rivière de notre enfance..

"....
Ce n'est pas du sang qui coule dans nos veines
C'est la rivière de notre enfance
Ce n'est pas sa mort qui me fait d'la peine
C'est de n'plus voir mon père qui danse
..."

Michel Sardou - Garou (La rivière de notre enfance)

On a tous une rivière quelque part, une maison, un jardin, un appartement, une porte, un couloir, un escalier...

C'est la maison de notre enfance. Celle(s) où après l'école, on rejoint, le coeur léger, la chaleur et la protection, ou bien celle où le coeur lourd, il nous faut rentrer car quand on est enfant, on n'a pas vraiment le choix.

Si vous voulez, racontez nous comment elle était pour vous, dans vos yeux d'enfants, d'adolescent cette "maison de votre enfance".

La maison de mon enfance était immense pour moi. D'ailleurs tout était trop grand. « Les grands » étaient trop grands, les adultes trop imposants, mes cousins trop musclés. Ma chambre était immense, je m'y perdais et avais peur. Les placards montaient jusqu'au plafond, il me semblait qu'ils étaient hauts de 15 mètres en moins.

C'était comme on dit une maison de maître, et les mètres en effet ne manquaient pas. Le plus souvent, j'allais me réfugier au dernier étage dans une chambre sous les combles. Il était petite mais à ma taille. Il y avait un lit. Elle n'était pas chauffée, l'hiver je me glissais sous les draps et les couvertures pour lire tranquillement les livres qui traînaient çà et là. C'était un peu mon havre de paix et l'un des rares bons souvenirs de cette enfance là.
La chambre était aussi froide que ne l'étaient mes parents. Les livres étaient mes amis et mon refuge.

La maison de mon enfance ... était un appartement. Si je m'en souviens encore c'est parce que cet appartement, où mes parents avaient emménagé à ma naissance, ils sont restés là toute leur vie et il a été vendu après leurs décès...

Cet appartement semi bourgeois en région parisienne était petit ! Il n'y avait que deux chambres et un salon qui avait été transformé en bureau pour l'activité de mon père.

Alors, nous étions un peu les uns sur les autres d'autant que nous y vivions à 8 personnes (mes parents, nous less 4 filles, et mes grands parents maternels qui ont partagé notre vie... jusqu'à leurs décès) !

Alors moi je n'avais pas de chambre, non c'était la chambre des filles (nous les trois plus grandes)... et j'en rêvais d'avoir une chambre à moi !!

Je n'étais pas la seule, je pense, car un jour nous avons fait des "séparations"... en punaisant au plafond des draps !!

Les enfants ne manquent pas d'imagination pour réaliser leurs rêves... mais nos travaux de "bâtisseurs" ont été très mal accueillis ... et nos rêves aussi d'ailleurs

Mais, même si c'était petit, j'avais peur et pour aller seule dans ma chambre qui n'était qu'à une porte... je chantais à tue tête pour me donner du courage...

alors s'isoler, oui, j'en rêvais .... je n'ai trouvé que le silence de ma tête derrière un gros mur bien épais !

La maison de mon enfance, c'était une petite maison ouvrière mais avec un grand terrain à l'arrière, où mon père avait établi son atelier de menuiserie-ébénisterie.

J'y ai passé des heures à débiter des planchettes en bâtons-allumettes, à sculpter des dessins dans les planchettes qui restaient, à l'aide d'un vieux chasse-clous et d'un burin émoussé. Je fabriquais aussi d'affreux petits meubles bancals, armée d'un petit marteau pas trop lourd pour mes petites mains.

C'était aussi l'endroit où je faisais des pâtés de sciure de bois, à défaut de pâtés de sable.

Dans le grenier, mon père m'avait installé une escarpolette. Le grenier, c'était l'endroit où je me retirais pour rêver et lire tout ce qui me tombait sous la main. C'est ainsi que j'ai fait la connaissance des Pieds Nickelés, dont mon père avait gardé quelques albums. L'endroit aussi où je me déguisais avec des vêtements trouvés dans une vieille valise.

Ah, ils ne savent pas ce qu'ils perdent, les enfants dont la maison n'a pas de grenier !

Quand j'étais encore très petite, j'ai un jour dévalé tous les escaliers, en emportant avec moi une petite chaise dont le poids m'avait sans doute entraînée vers le bas.

Ceci me rappelle un mot que je trouve savoureux, du dialecte local : en parlant de ce genre de pirouette, on parlait de "cavoler". Rien qu'en écrivant ce mot, je me vois encore dans cet escalier, tombant, roulant, tenant toujours la chaise entre mes mains et faisant un boucan épouvantable.

Ma pauvre grand-mère a eu la frayeur de sa vie ! Mais mauvaise herbe ne crève pas et je m'en suis tirée sans trop de mal.

Autre souvenir : mon artiste de père avait un certain nombre de cordes à son arc et entre autres, il ne peignait pas mal. Il avait décoré un grand mur d'une sorte de fresques peintes d'après des cartes postales. Il y avait notamment un paysage montrant le château de Chinon.

Cette maison a été aussi le théâtre de mes grandes frayeurs d'enfant, quand ma mère, pour me punir de je ne sais quoi, m'enfermait dans la cave, sans lumière. (Maintenant, elle nie les faits !)

Il y avait dans cette cave, des crapauds, des souris, des rats et une armada d'araignées. Et je hurlais à m'en casser les cordes vocales quand j'essayais de grimper l'escalier pour retrouver la lumière.

Et après, mes parents se demandaient pourquoi j'étais terrorisée quand je devais aller au WC situé dans la cour. On disait d'ailleurs "aller à la cour" pour désigner cette activité de vidange.

A l'époque, ma bien-aimée chatte dont j'ai parlé sur un autre topic, était vraiment une héroïne : elle chassait les rats ! Et un jour, elle a même été réprimandée pour avoir cassé un plateau à tarte en verre mais c'est par après qu'on s'est rendu compte qu'en fait, elle l'avait fait en pourchassant un rat.

Finalement, je me demande comment j'ai fait pour ne pas être plus dérangée du ciboulot que je ne le suis. Parce que maintenant, ça me fait rire ou sourire mais à l'époque, je ne rigolais pas.

Ramsès, j'aime beaucoup comment tu racontes ton enfance...
C'est touchant....
C'est comme si on y était !

La maison de mon enfance...

C'est drôle je ne m'en souviens plus, plus d'image dans ma tête, je ne la vois pas, aucune odeur.Le vide

J'en connais l'adresse, je suis allée voir il n'y a pas si longtemps
Tout a été rasé.
Et reconstruit

Mais j'aime bcp lire vos souvenirs, les descriptions de vos maisons d'enfance
Merci

Alain a écrit:

Ramsès, j'aime beaucoup comment tu racontes ton enfance...
C'est touchant....
C'est comme si on y était !

Merci. J'ai depuis toute petite le sens du récit mais là, je n'ai rien inventé !

Il y a des choses que je n'ai pas essayé de faire passer : l'odeur propre à ce grenier - mon père y avait aussi une partie de ses machines à bois.

Le bois fraîchement scié dégage à la fois une odeur de résine et une odeur de thérébentine.

Ce grenier est à tout jamais associé, dans mon esprit, à l'odeur de la sciure de bois, à la poussière et aux vieux livres. Et les briques qui n'avaient pas reçu d'enduit étaient noires !

Mais même pas plus noires que dans le grenier de mon école où la salle de gym avait été installée. Une partie de ce grenier - remontant au 13e siècle - était d'ailleurs interdite ! Lol, je crois que toutes les élèves ont bravé l'interdit parce que ces vieilles briques étaient vraiment fascinantes mais de visu, c'était plutôt décevant.

Je crois que nous nous attendions toutes à voir surgir un fantôme des murs !

Très beaux souvenirs d'enfance concernant ton père que tu nous livres.

Ton récit est très vivant. Et ton père, on regarde et écoute ses gestes..

C'est sûr que dans ces métiers perdure toujours le besoin de "transmettre" et que cela on le ressent beaucoup chez lui !

Je ne sais pas s'il avait envie de transmettre son métier mais le goût du beau, sûrement et aussi du travail bien fait.

A l'époque, pour une fille, ce n'était pas un métier que l'on pouvait envisager.

J'aurais encore bien des choses à raconter sur ce père qui a été un vrai modèle pour moi.

Nous écouterons tes souvenirs avec beaucoup d'intérêt.

Oui Ramsès, je suis preneuse aussi

J'ai beaucoup aimé te lire
Tu racontes de manière très vivante...

Je me souviens de quelque part ; ce n'était pas une maison, un lieu clos et définit avec une adresse.

C'était ailleurs près d'un glacier, un vieux chalet, une fontaine, les Alpes qui brodaient les aubes et les crépuscules, et j'apprenais l'essentiel, je faisais partie de la nature ni plus, ni moins, et du bonheur qui m'entourait dans une parenthèse...

Je m'en souviens.

Je te souhaite de pouvoir retourner dans ce lieu magique..

autrement que dans tes rêves !